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Petit abécédaire de l’école en Australie (tome 3)

P comme Public / Privé

On a eu un peu de mal à comprendre la différence entre public et privé, car ça ne se superpose pas vraiment avec la distinction en France … Même dans les écoles publiques, si on n’a pas le bon visa, on doit payer des frais de scolarités assez monstrueux (si on avait dû payer le vrai prix pour la scolarité de nos trois enfants, la totalité du financement de JF y passait, on aurait dû choisir entre se loger ou les mettre à l’école !). Nous étions donc très heureux d’avoir le « bon visa », qui nous considère comme des « résidents temporaires » et pas comme des étrangers ! Au passage, ce n’est pas mal de se rappeler ce que coûte vraiment une école, un bâtiment, des structures, des enseignants, etc … Ce n’est pas un « dû », justement !

Quant aux établissements privés, on n’a eu aucun contact, mais il parait que les frais de scolarité sont les frais réels … Mais pourquoi donc certaines personnes mettent leurs enfants dans le privé en Australie ? Les réponses que nous avons eues autour de nous sont « pour le prestige » et « pour avoir le bon réseau » … J’ai écouté poliment quand on m’a expliqué ça, mais je dois avouer que ça me dépasse un peu, comme mentalité …

R comme Ratio adultes/enfants

Ca, c’est une des grosses différences entre la France et l’Australie ! Et ça nous épate ! Avec quasiment le même budget national, ils arrivent à avoir quasiment deux fois plus d’adultes que nous en France pour le même nombre d’enfants.

Dans l’école primaire de Sarah, il y a, pour environ 300 enfants répartis sur 15 classes : bien sûr, une maitresse par classe, mais aussi une directrice à plein temps, un directeur adjoint à plein temps, une à deux personnes en permanence à l’accueil-secrétariat (ce qui correspond à au moins 4 personnes physiques), il y a aussi une comptable + les enseignants spécialisés (sport, musique, art, japonais) + la « EAL teacher », + une ou deux « well-being teacher » (voir “W”) + un homme d’entretien + les gens qui font le ménage + les bénévoles … ça laisse rêveur …

S comme Skills

« Skills », ce sont les compétences. Et c’est un mot qui est beaucoup plus utilisé que « knowledge », les connaissances. Tous les enseignants parlent des “skills”, et même les enfants ! Dès le primaire, ils y sont sensibilisés : au début de chaque leçon, la maitresse leur explique les « Learning Intentions » (objectifs d’apprentissage) et les « Success Criteria » (critères de réussite), qui sont écrits au tableau, et que les enfants recopient dans leurs cahiers. C’est comme si on donnait à l’enfant les outils pour savoir ce qu’il doit apprendre, ce qu’il doit être capable de faire … et on apprend à l’enfant à s’auto-évaluer (en comparant ce qu’il a fait aux critères de réussite annoncés).

Et les « skills » ne concernent pas seulement la dimension « scolaire », « intellectuelle » des apprentissages. Il y a aussi tous les « motor skills » (savoir attraper une balle est aussi important que maitriser l’orthographe), et les « social skills » (être à l’aise en société, savoir se faire des amis ou parler en public), qui sont « enseignés » à l’école, et attendus des élèves, y compris au lycée !

T comme Terrain de Jeux

Ca aurait pu être « E comme Equipment », parce que c’est comme ça qu’on appelle les « structures à grimper » gigantesques qui sont dans les cours de récréation. Le terrain autour des écoles est immense, comparé à la France : quel luxe (ou quelle chance ?) d’avoir construit des écoles en même temps que les villes, ou légèrement en-dehors des villes, et pas juste d’essayer de les faire tenir dans un espace restreint … Dans l’école de Sarah, il y a plusieurs cours de récréation, 4 terrains de tennis, un terrain de cricket, et encore plein d’espace autour. Et il y a trois structures différentes, dont une qui monte jusqu’à 4 ou 5 mètres de haut, avec toboggans, barres pour se suspendre, mini-tyrolienne, trucs divers pour marcher en équilibre, grimper, s’accrocher, se défouler ! Ah, j’oubliais le bac à sable, grand comme une salle de classe et ombragé, et les pneus à moitié enterrés sur lesquels on peut aussi jouer et grimper !

Et on a même le droit d’y rester après la fin des classes, puisque « c’est une école publique, donc les structures sont publiques, et bien sûr les enfants de l’école peuvent y accéder même en-dehors des horaires scolaires » … ça alors !

Un jour, la maitresse m’a dit que, vraiment, Sarah était tout le temps sur les barres (au point d’avoir des ampoules plein les mains), « comme si elle n’avait pas l’habitude ». Et là, j’ai essayé de lui expliquer qu’effectivement, elle n’avait pas l’habitude, parce que, en France, la majorité des écoles n’ont que des cours de récréation complètement nues, le plus souvent même sans arbres. Elle m’a fait répéter trois fois, et je crois qu’elle ne m’a pas crue …

Dans un autre coin de la cour de l’école, il y a aussi un jardin potager et un poulailler. Sarah s’inscrit régulièrement pour aller nourrir les poules et ramasser les oeufs, avec les deux « grandes » de 12 ans qui sont responsables de ça : c’est trop bien !

Et aussi, bien sûr, les enfants ont le droit de se fabriquer des cabanes entre les arbres, derrière les haies, etc … Ils ont en tout et pour tout 30 min de récré le matin et 1h au moment du lunch, mais ils en profitent à fond !

Le plus grand “playground” de la cour (Sarah, à gauche, donne l’échelle)
Le “playground” des 5-7 ans

U comme Uniforme

Et oui, l’Australie est un pays où la quasi-totalité des écoles ont un uniforme. Chaque école a le sien, ses règles et son degré d’application des règles.

Au début, nos enfants trouvaient ça bien étrange : Sarah récalcitrante, Claire très contrariée à l ‘idée d’être en robe tous les jours, et Simon un peu dépité et coincé avec son blaser. Mais tout le monde s’est habitué très vite. Sarah “se sent bien dedans” et est très heureuse de le mettre tous les matins. Pour les deux grands, c’est moins flagrant : ils ont intégré comme une évidence que c’est ça la tenue d’école … mais sont très heureux de se changer dès qu’ils arrivent à la maison, pour retrouver des vêtements un peu plus confortables !

Trois écoliers prêts pour les cours !

La différence entre l’uniforme de primaire et celui du secondaire est manifeste. Dans un cas, l’objectif est que les enfants soient confortables et puissent bouger tant qu’ils veulent, et chacun peut choisir s’il préfère robe, short à plis, short droit, short-jupe, jupe ou pantalon. C’est fonctionnel. Dans l’autre … c’est plus subtil à expliquer, mais quelque chose comme “on vous prend pour des grands, sérieux, raisonnables, futurs adultes qui serez bien habillés pour aller travailler”. Et c’est vrai, après tout, dans la plupart des postes, la tenue vestimentaire est importante. Peu de travailleurs peuvent s’habiller en jean troués-Tshirts avachis sur leur lieu de travail. Alors, pourquoi pas considérer les ados comme des futurs adultes, plutôt que comme une catégorie à part ?…

L’uniforme contribue aussi à donner aux enfants le sentiment d’égalité entre eux, et en même temps d’appartenance à un groupe. Ce groupe, c’est l’école toute entière (y compris des camarades que je n’ai pas choisi et que je n’aime pas), et pas seulement mon groupe de copains. Et un autre effet de l’uniforme, c’est que la manière dont je me comporte quand je suis en uniforme montre aux gens la “qualité” de mon école …

Une particularité avec les uniformes : les signes religieux sont autorisés (turban sikh, foulard musulman, etc …) à condition qu’ils soient discrets, et … d’une couleur assortie à l’uniforme ! Quelle belle manière toute simple de concilier l’individualité et l’appartenance à un groupe plus large !

Le choc culturel a été non seulement l’uniforme, mais aussi les magasins d’uniformes ! Car en début d’année, il faut s’équiper ! Et tout se trouve dans des magasins dédiés, qui ressemblent à ça :

Pour les uniformes, il y a des magasins spécialisés…
Tout est bien rangé avec un rayon par école.

Heureusement que les vendeuses sont nombreuses et bien au courant; elles nous ont été très utiles !

Il a aussi fallu s’adapter au niveau des lessives ! Pour avoir des vêtements propres tous les matins (5 jours par semaine pour 2 ados et une sportive), il faut en faire des lessives !! Et est-ce que je peux laver sans risque dans la même machine un T-shirt orange pétard et une chemise blanche ?? Je n’ai jamais osé essayer !

V comme Vocabulaire …

J’ai déjà mentionné que l’Anglais n’était pas une “langue étrangère”, mais une “langue additionnelle”, et que je trouvais la différence intéressante (voir E comme EAL). Il y a un certain nombre d’autres exemples où l’usage d’un mot plutôt que d’un autre en anglais donne un sens différent à la même idée exprimée par un mot français.

Par exemple, les enfants ici ne sont pas des “élèves”, mais des “students” ! C’est le même mot qu’on utilise, du début de l’école primaire (5 ans) à l’université : tous les “apprenants”, quel que soit leur âge, sont des “students”. Quand j’ai appris l’Anglais au collège, j’avais appris le mot “pupil” pour traduire notre mot “élève” français, mais de nos jours en Australie, il n’est pas du tout utilisé ! Et cette nuance nous interpelle : derrière le mot “student”, il y a l’idée que la personne qui apprend est active, volontaire, responsable de son apprentissage, alors qu’un “élève” est plus passif, et attend que quelqu’un d’autre lui enseigne des trucs. Est-ce qu’il faut aller jusqu’à y voir une différence profonde dans la pédagogie ? peut-être …

De la même manière, en face d’un “student”, il y a un “teacher”, sans aucune nuance entre l’école primaire ou le lycée : c’est le même mot. Certains “teachers” de l’école primaire sont spécialisés, dans des matières comme l’Art, la Musique, le Sport, et n’enseignent que ça. Mais inversement, au lycée, certains “teachers” ne sont pas spécialisés uniquement dans une matière : ils peuvent très bien enseigner les maths ET les sciences, ou la psychologie ET l’Anglais, par exemple. Et ça se comprend, puisque la fonction d’un “teacher” est de fournir à l’enfant les conditions pour qu’il apprenne, et pas de lui transmettre un savoir… D’ailleurs, au lycée, il n’y a pas une catégorie à part de personnel qui soient des “surveillants” : ce sont les “teachers” qui se relaient dans la cour, et en profitent pour discuter avec les élèves de manière informelle. Nos enfants trouvent ça très sympa !

W comme “well-being”

Well-being se traduit en théorie par “bien-être”, mais … l’idée d’un professeur de bien-être n’est pas du tout adaptée ! Les “well-being teachers” sont des enseignants, sans classe attitrée, présents sur l’école et attentifs au bien-être psychologique des enfants. En période de rentrée scolaire, ils rassurent les parents inquiets, (entre autre ceux dont la grande fille de 10 ans ne parle pas encore anglais), et vont de classe en classe, pour passer du temps avec ceux qui en ont besoin, consoler ceux qui pleurent, repérer les enfants qui paraissent fragiles ou anxieux. Au quotidien, ils montent des projets comme le poulailler ou le potager. Ils rappellent aussi les règles concernant la santé (protection contre le soleil, hydratation) et aident à les faire respecter, et à se donner les moyens de les mettre en place (fontaines d’eau potable dans la cour, par exemple).

En période de confinement et d’école à la maison, ils sont infiniment précieux !! Dès le début, ils ont transmis aux enfants et aux parents des coordonnées de gens qu’on peut appeler si besoin, du psychologue à la protection de l’enfance. Et ils ont donné des points de repère pour le déroulement de la journée confinée, avec la nécessité d’alterner du travail et du jeu, de respecter les rythmes de sommeil et d’alimentation, de sortir, de bouger, etc … Et toutes les semaines, ils nous envoient un petit projet, ou un petit travail, pour aider l’enfant à se sentir bien et à positiver.

Les 26 mots choisis par Sarah, pour se présenter de manière positive …
Et sa “carte du coeur”, avec les choses qu’elle aime, classées par catégories