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En guise de conclusion…

Dernier article, posté depuis l’aéroport, derniers instants sur le sol Australien …

Au moment de partir, et de tirer, peut être, des conclusions ou de résumer ce que nous avons vécu, il y a trois remarques, ou trois citations qui me trottent dans la tête.

La première est celle d’un ami Sud-Africain, quelques temps avant notre départ:

Why do you want to go to Australia ? It’s a boring place. Sure, there are places of amazing natural beauty, but they are so far apart. And nothing is happening. At least here (SA) the politics is interesting, things are moving.

La seconde est un commentaire d’un chercheur Allemand, employé par Monash U et basé en Australie depuis une dizaine d’années :

Why did I stay here? Well, the weather is fine, the food is good, the people are nice…

Pour contradictoires qu’elles puissent sembler, je trouve que ces deux citations se complètent très bien, et paradoxalement disent la même chose. Finalement, c’est peut être encore Bryson qui l’a le mieux articulé :

Australia is mostly empty and a long way away. Its population is small and its role in the world consequently peripheral. It doesn’t have coups, recklessly overfish, arm disagreeable despots, grow coca in provocative quantities, or throw its weight around in a brash and unseemly manner. It is stable and peaceful and good. It doesn’t need watching, and so we don’t. But I will tell you this: the loss is entirely ours.

You see, Australia is an interesting place. It truly is. And that really is all I’m saying.

Parce que, si l’Australie a des déserts rouges, elle a aussi des extraordinaires forêts où poussent des arbres parmi les plus grands du monde. Le pays est essentiellement une immense plaîne poussiéreuse et chaude, mais on y trouve aussi des montagnes enneigées. Si l’essentiel du territoire est une vaste immensité vide, les villes Australiennes sont des métropoles de plusieurs millions d’habitants. Et si il y a bel et bien des surfers sur les côtes et des kangourous dans les prés, il y a aussi des galeries d’art de niveau mondial dans les capitales d’Etat. Les banlieues manquent sans doute de charme, mais les centre-villes, même des villes moyennes, sont un ravissement architectural permanent. Les musées, même de province, ont de quoi ridiculiser leurs équivalents européens. Et la scène culturelle de Melbourne ou de Sydney n’a rien à envier à celle de Paris …

Mais au fond, le plus important c’est ce que les touristes ne voient pas.

Les barbecues publics dans les parcs, et l’odeur de saucisse grillée des gros australiens en T-shirt, cohabitent avec des réseaux de bibliothèques publiques ouverts 7 jours sur 7 jusqu’à 20h, d’une richesse qu’on a du mal à imaginer dans pas mal de villes Françaises. Les trains de banlieue sont propres, sûrs, rapides et à l’heure. Jamais nos enfants n’ont été aussi heureux d’aller à l’école que à Melbourne. On peut marcher dans les rues le soir, sans craindre de s’y faire aggresser, et si un sagouin a bel et bien volé mon vélo, la police n’a jamais donné l’impression que ce fût normal, prévisible, ou même sans importance. Melbourne ou Sydney sont des métropoles tentaculaires, des villes de plusieurs millions d’habitants qui s’étendent sur des dizaines de kilomètres. Ce sont aussi des villes parmi celles qui ont la meilleure qualité de vie au monde. Alors même que leur population double tous les 40 ans et qu’elles s’étendent chaque jour un peu plus…

A l’heure de l’épidémie de CoVid, les Australiens ont tellement bien réagi aux consignes sanitaires que l’efficacité des mesures a dépassé tout ce que les planificateurs avaient osé prévoir, et que le pays s’est quasiment débarassé du virus en trois mois (bon, j’ai écrit ça avant la deuxième vague. C’est un peu moins joli en ce moment, mais d’un autre côté les choses semblent pas trop mal gérées et en tout cas circonscrites. Sauf à Melbourne, hélas pour nous.). A part les voisins Kiwis, qui peut en dire autant ?

A Melbourne, 40 % des habitants ne sont pas nés en Australie, et autant ne parlent pas (ou pas seulement) anglais à la maison. 1/4 des Melbourniens se disent “d’origine australienne” (et un autre quart “d’origine Anglaise”). 50000 étrangers viennent chaque année s’y installer. Leurs enfants sont, ou seront, Australiens, et ne verront aucune contradiction à s’appeler Singh, Nguyen ou Muhammad – et, même si ici comme ailleurs rien n’est parfait, leurs voisins Smith ou Jones n’auront pas non plus de problème avec ça. A l’école, les profs et les enfants que nous avons rencontrés s’appellent Timothy Picconi, Helen Koziaris, Kevin Nguyen ou Sarah Liu. La “cuisine australienne”, si on peut dire, inclue le fish and chips, le curry, les dumplings, ainsi que les olives à la grecque ou les lasagnes.

Plus largement, la population Australienne a doublé tous les 40 ans, presque à chaque génération; et malgré, ou à cause, de celà, la société Australienne est fondamentalement harmonieuse, et multi-culturelle sans que ce soit un drame…

Sans faire de bruit, sans que le reste du monde le remarque, les Australiens ont construit sur leur île lointaine une société fonctionelle, prospère, essentiellement heureuse, paisible et agréable.

You see, Australia is an interesting place. It truly is“. Mais peut-être pas pour les raisons les plus évidentes à première vue.

It doesn’t need watching, and so we don’t. (…) The loss is entirely ours” … That it is, indeed.

Cheers, mate. So long, and see you next.

( L’Australie est pratiquement déserte et très, très loin de tout. Elle n’a pas une population très importante, et par conséquent elle joue dans le monde un rôle marginal. Elle ne connaît pas les coups d’État, n’épuise pas les réserves de poissons, n’arme pas d’horribles despotes, ne pratique pas la culture de la drogue de façon indécente. Bref, c’est un pays qui ne joue pas les gros bras et ne fait pas sentir sa puissance d’une manière provocante et déplacée. Un pays stable, pacifique et correct. Un pays qui n’a pas besoin d’être surveillé du coin de l’œil, ce qui fait qu’on ne le regarde même plus.
Mais laissez-moi vous dire une chose : c’est nous qui y perdons. Parce que, voyez-vous, l’Australie est un pays intéressant. Vraiment. Et au fond, c’est tout ce que je voulais dire.
)